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Critique d'album

Kvelertak


Nattesferd


(13/05/2016 - Roadrunner - Black 'N Roll - Genre : Hard / Métal)
Produit par Kvelertak / Nick Terry

1- Dendrofil For Yggrasil / 2- 1985 / 3- Nattesferd / 4- Svartmesse / 5- Bronsegud (SSQ) / 6- Ondskapens Galakse / 7- Berserkr / 8- Heksebrann / 9- Nekrodamus
Note de 5/5
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Note de 4.5/5 pour cet album
"Ypperlig skriker metall"
Etienne, le 25/05/2016
( mots)

Ou en norvégien, "Superbe métal hurlant". C'est ainsi que Kvelertak pourrait être décrit. Une fois n'est pas coutume, la Scandinavie se révèle une fois encore à la pointe d'une scène en perpétuelle évolution, au dynamisme impétueux, toujours en passe de réussir un coup d'éclat au moment le plus inopportun.


Il y a 6 ans maintenant, un sextuor de jeunes rockeurs avides de décibels livrent un premier album transcendant, outrepassant les limites du raisonnable en mêlant leurs influences punk et black metal pour un résultat qui a sans nul doute écrit une nouvelle page dans la grande histoire du rock 'n roll. En 2013, pour leur deuxième album Meir, les norvégiens sont encensés par toutes les rédactions, des plus modérées et consensuelles (Rolling Stone) aux plus indépendantes (SPIN, Revolver) voire improbables (New York Times). Ils auront même droit à un EP live partagé avec Gojira, référence incontestable de la scène metal. Une véritable consécration, un adoubement général qui pose la question de la direction artistique prise par Kvelertak au moment de réfléchir à un successeur. Et si avec Nattesferd Kvelertak a changé, il n'a en rien diminué sa hargne et son brio.


Symptomatique d'une évolution relativement drastique, John Baizley (Baroness), grand copain de la bande, ne signe plus les pochettes de Kvelertak et le groupe quitte ses allants jaunâtres pâlichons pour une palette bleutée froide et rocheuse sur laquelle Arik Roper (High On Fire, Sleep ou encore Black Crowes) expose le guerrier et son chouette ersatz animal. Un monde à la fois âpre et poétique se dévoile, parfaite analogie picturale de ce qu'est la musique de Kvelertak. Loin des codes du genre, le black 'n roll de la bande navigue alternativement entre un metal rugueux et terreux allant chercher tout son corps dans les méandres du plancher des vaches à grands coups de rythmiques martelées avec poigne ("Dendrofil For Yggdrasil"), et un rock plus aventureux entreprenant des voyages complexes au gré de phrasés variés et aérés ("Ondskapens Galakse"). Quoi qu'on en dise et aussi grandiose soit-elle, l'expédition Nattesferd reste particulièrement mouvementée.


Déjà car les six norvégiens ne ménagent pas leur auditoire en chantant uniquement dans leur langue natale. Une intention plus que louable, en opposition à l'aseptisation angliciste de masse, qui déroute quand même beaucoup. A des syllabes scandinaves déjà râpeuses, Erlend Hjelvik leur fait subir un traitement hurlé qui réduit l'intelligibilité des paroles de Kvelertak au néant. Est-ce bien un problème pour autant ? Dans l'absolu pas vraiment. Plus personne ne fait vraiment attention aux paroles de toute façon. Bien plus qu'une signification basique, il convient donc de voir les mots du parolier scandinave comme une affirmation d'une identité très marquée et d'une patte sonore foncièrement unique dans le paysage musical. Ici pas de faux-semblant, Nattesferd nous est livré tel qu'il a été pensé: brut et direct, que ça nous plaise ou non.


Et histoire de pousser le bouchon encore plus loin, l'album a été enregistré "live", à l'ancienne, les six musiciens réunis en même temps dans le studio. Une initiative rare à l'heure où la majorité des formations scindent les prises, généralement par instrument, afin d'optimiser le temps passé dans les studios. Mais c'est mal connaître les norvégiens qui n'ont que faire des habitudes de leurs congénères. Eux veulent revenir aux bases du rock 'n roll, à l'intuition primaire d'une interprétation éphémère et au plaisir si singulier d'une bande de potes qui font vibrer les murs et fumer les amplis. Quand on y pense, Nattesferd se veut un disque absolument unique, peut-être différent de celui auquel le groupe avait pensé, peut-être meilleur, peut-être moins bon, nous ne le saurons de toute façon jamais. La magie d'un enregistrement où l'erreur n'est pas possible apporte une saveur particulière à chaque note de ce disque et il faut bien reconnaître que Kvelertak réalise avec Nattesferd un véritable tour de force en lui offrant un environnement artistique dense et intelligent.


Tout un contexte qui n'est évidemment pas sans impact sur la qualité sonore de Nattesferd. Là où la concurrence est précise dans ses arrangements et minutieuse dans la qualité de sa musicalité en studio, Kvelertak est plus brouillon, plus direct. Plus puissant et plus tribal aussi. Nattesferd prend aux tripes avec une force sauvage et ce d'entrée de jeu en proposant d'emblée son titre le plus violent, l'épique "Dendrofil for Yggdrasil". Sûr que pour rentrer dans ce nouvel album, mieux vaut être préparé à en prendre plein les oreilles: chant rageur, mains lourdes sur les cordes et les tomes, énergie débordante, Kvelertak soigne son entrée en réaffirmant (encore) qu'il ne compte pas ménager ses auditeurs. Toujours à l'affût, le son brut de l'enregistrement rend la cavalcade "Bronsegud" encore plus folle - quelle batterie... -, encore plus intrépide, encore plus vraie. Tout le long de Nattesferd, Kvelertak semble au sommet de son art dans cet élément dangereux et inconfortable de l'enregistrement en direct. De cette épreuve du feu, le groupe sort grandi et s'il a persisté dans l'exécution de titres expéditifs et viscéraux, il reste au fait de son talent en proposant bien plus qu'un simple brûlot musical viril et abrasif.


Les norvégiens sont allés piocher au fin fond du répertoire rock 'n roll pour ce nouvel effort. Des influences qu'ils associent à merveille à leur identité sonore. A la louche, on retrouve la basse et la batterie tranchantes d'Iron Maiden ("Svartmesse", "Heksebrann"), les breaks supersoniques et les arpèges spatiaux de Mastodon ("Bersekr") ou encore un travail d'harmonie très fin sur les trois guitares qui rappelle sans mal Thin Lizzy ("1985"). On continue ? Et si on parlait de l'acoustique chevaleresque d"Ondskapens Galakse" qui s'évapore dans l'air polaire à la manière des grands morceaux du Metallica de Ride The Lightning ? Ou encore de cette solide masse sonore que pratique Kvelertak à base de grosses guitares baveuses, de riffs tendus et de mélodies sur le fil du rasoir rappelant Kylesa, Torche et autre Baroness ? Une base d'influences solides - et plutôt correctes n'est-ce pas ? - sur laquelle Kvelertak a bâti son excellent Nattesferd qui réussit bien plus qu'une simple confirmation du talent du groupe.


Car voilà un album qui pourrait bien pousser les métallo-sceptiques à reconsidérer leurs appréhensions. Malgré un chant hurlé dans la pure tradition nordique, Kvelertak ose des compositions fleuves, souvent longues qui proposent de superbes passages instrumentaux et de belles constructions mélodiques. Et malgré son entame relativement abrupte, Nattesferd retrouve vite le chemin glorieux de morceaux impeccables ("1985", "Nattesferd", "Svartmesse") dont les allants presque pop séduiront à coup sûr les plus récalcitrants. Propices à un voyage de tous les instants, Nattesferd trouble les limites entre une scène black metal stéréotypée et une scène rock en quête éternelle de second souffle. Un genre hybride pour fédérer autour de refrains forts ("Svartmesse"), d'ardeurs punk tonitruantes ("Bronsegud") et de phrasés cycliques pesants ("Nekrodamus"). L'un des nouveaux fleurons de la scène metal.


Sans être une totale surprise, Kvelertak remporte haut la main le pari de concrétiser une montée en puissance déjà très remarquée. En possession d'un talent colossal, les six norvégiens évitent l'écueil de la facilité en emmenant Nattesferd dans un autre espace de leur univers. Et nous aussi par la même occasion. L'un des très grands albums metal de l'année.


Chansons conseillées: "1985", "Nattesferd", "Ondskapens Galakse".

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