On va rapidement situer le contexte. D'un côté nous avons Noel Gallagher et de l'autre Liam Gallagher, deux frangins à l'origine de l'un des groupes les plus emblématiques de la Brit Pop. A savoir Oasis. 65 millions d'albums vendus à travers le monde. Chacun de leurs 7 albums studio a toppé les charts du Royaume-Uni et le groupe détient le record de la plus longue durée de présence dans les charts britanniques, à savoir 766 semaines. Soit quasiment 15 ans. C'est beaucoup.
Bref. Pour la faire courte, malgré le succès (Ou peut-être à cause du succès. Le débat est ouvert) les deux frangins ne s'entendent pas très très bien. Ils se sont traités à peu près de tous les noms d'oiseaux existants et se sont adonnés à quelques séances de pugilat en public. Jusqu'au jour où ça pète plus que d'habitude et que les deux frères refusent de monter sur scène, annonçant par la même leur séparation définitive. C'était en 2009, en France, lors du festival de Rock en Seine.
Noel a formé le groupe des High Flying Birds sous son propre nom. Ce qui donne Noel Gallagher's High Flying Birds. Une allusion directe au magnifique groupe Jefferson Airplane, grand représentant du courant psychédélique américain dans les années 70. Et cette année (2017) à vu paraître son 3ème opus, à savoir Who Built The Moon? qui fait suite à deux albums sortis en 2011 et 2015, globalement appréciés mais relativement inégaux.
De son côté, le cadet ne s'était manifesté que sous la forme de Beady Eye. Un groupe composé d'anciens membres d'Oasis mais sans l'aîné Gallagher. Le résultat n'avait clairement pas fait l'unanimité et Liam, n'ayant pas la langue dans sa poche et clamant à qui veut l'entendre qu'il est le meilleur des deux frangins au grand bonheur des tabloïds, se fait rapidement une réputation de grande gueule sans grand talent d'écriture. Sauf qu'en Octobre 2017, le vilain petit canard a accouché de As You Were qui a eu le mérite de mettre tout le monde sur les fesses, nous les premiers. En témoigne la critique de Raphaëlle.
La réponse du grand frère Who Built The Moon? est donc tombée le 24 Novembre, et le moins que l'on puisse dire c'est que c'est complètement différent tant dans le style que dans l'approche. Là où le As You Were du frangin brillait par sa justesse dans l'interprétation mais souffrait d'une certaine redondance dans l'écriture, Who Built The Moon? brille par son écriture mais frustre parfois dans son interprétation. Une vraie complémentarité fraternelle.
Il est toutefois important de souligner que dans les coulisses de cet album nous avons à la réalisation David Holmes. L'homme s'était notamment fait connaître en signant la B.O. des films Ocean's Eleven, Ocean's Twelve et Ocean's Thirteen. Noel témoigne dans plusieurs interviews que Holmes était un vrai catalyseur sur l'ensemble du processus. Notamment en le forçant à sortir de sa zone de confort via des réflexions telles que "Tu as déjà fait ça. Va plus loin. Explore autre chose". Noel admet avoir éprouvé beaucoup de difficultés dans ce processus mais le résultat est là. Who Built The Moon? contient plus d'une pépite dans sa tracklist. L'introduction sur "Fort Knox" est une claque monumentale. "Be Careful What You Wish For" brille par sa justesse. Les interludes "Wednesday (Part 1 & 2)" tombent à point nommé dans le processus d'écoute et le bonus track "Dead In The Water" nous rend très efficacement nostalgique d'une époque "Wonderwall" désormais révolue.
L'ennui, c'est que dans le même album on retrouve des morceaux comme "Holy Mountain" qui tombe dans des redondances et des facilités d'écriture assez décevantes, ou encore "She Taught Me How To Fly" qui souffre de symptômes très similaires. Et c'est ce qui caractérise pas mal le disque. A plusieurs reprises on se pose la question de la légitimité de certains morceaux sur la tracklist tandis que d'autres surprennent et offrent une très bonne expérience d'écoute. Heureusement ces derniers sont largement minoritaires et aucun d'entre eux n'est foncièrement mauvais, mais cela vient entacher l'ensemble qui place pourtant la barre très haute. Et c'est dommage.
En ce qui concerne l'auteur de ces lignes, Who Built The Moon? est le premier album des High Flying Birds qui parvient réellement à attirer mon attention. Ne serait-ce que parce que Noel y tente de nouvelles choses et ose aller là où son frère n'ose pas. Liam avec As You Were excellait dans un style très post-Oasis. Cela plaît et ce n'est pas une mauvaise chose, mais Noel nous offre une approche différente, au-delà de la nostalgie omniprésente d'une Oasis-mania désormais révolue. Et puis l'artwork est magnifique donc d'un point de vue marketing ça se pose là. Après je dis ça...
Cela dit, quoiqu'il arrive, on en vient toujours à la même conclusion. Quand on voit ce que les deux frères sont capables de produire aujourd'hui chacun de leur côté, l'un en termes d'écriture et l'autre en termes d'interprétation, on ne peut s'empêcher d'espérer un ultime album commun. Un jour peut-être.
Plutôt que de nous refaire une redite de ses deux premiers disques solo, Nono s'éloigne des canons d'Oasis et cède à sa marotte psychédélique - une obsession depuis Be Here Now. Arrivé en studio sans aucune composition en poche, l'aîné des Gallaghers s'est lancé sans filet et en roue libre, pour un résultat qui aurait clairement pu être catastrophique. À l'arrivée, Who Built The Moon?, derrière ses atours brumeux et gentiment barrés, se démarque par sa fraîcheur, sa candeur, son énergie et le sentiment d'instabilité qu'il dégage. Mais en dépit de quelques belles trouvailles ("It's A Beautiful World" avec ses délicieux avertissements frenchy, "She Taught M How To Fly", "Black and White Sunshine"), ce LP 3 manque de consistance et, disons, de sérieux. Un disque bon mais sans enjeu, fruit d'un type brillant qui n'a plus rien à prouver et qui a depuis longtemps cessé ne serait-ce que d'essayer de se transcender.
Et soudain, la claque. On ne sait pas très bien quoi penser de cet album qui n'est jamais là où on attendrait un frère Gallagher: la guitare de "She taught me how to fly" s'inspire directement de New Order, "It's a beautiful world" va chercher des beats électro, "Black and White Sunshine" est un inspiré retour aux sources brit pop, quant au titre d'ouverture, "Fort Knox", on ne sait pas très bien où le classer mais il nous emporte comme jamais un titre écrit par Noel nous avait emporté avant. Tout ça pour que finalement le titre éponyme soit un titre Gallagherien pur jus, avec un twist Gainsbourgien. Le tout donne un album ébouriffant, déconcertant, audacieux, parfois raté, parfois grandiose. On comprend mieux, à l'écoute des deux frangins, pourquoi la reformation d'Oasis ne sera jamais possible...
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