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Critique d'album

Puscifer


Existential Reckoning


(30/10/2020 - Alchemy / BMG - Fourre-tout à la Maynard - Genre : Rock)
Produit par Manynard James Keenan

1- Bread and Circus / 2- Apocalyptical / 3- The Underwhelming / 4- Grey Area / 5- Theorem / 6- UPGrade / 7- Bullet Train to Iowa / 8- Personal Prometheus / 9- A Singularity / 10- Postulous / 11- Fake Affront / 12- Bedlamite
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Le projet électro-indu singulier de MJK manque sans doute d'un poil d'autocritique"
Nicolas, le 19/01/2021
( mots)

Avertissement : cet article répond au vote des lecteurs réalisé dans le cadre de “l’album de l’automne 2020” : il vous était proposé de voter pour un disque non encore chroniqué sur Albumrock, le vainqueur ayant droit à une critique en bonne et due forme.


Pourquoi cet avertissement ? Eh bien pour une raison claire : si le disque en question n’avait pas été traité sur le site, c’est qu’il n’avait pas retenu notre attention, soit que nous étions passés à côté, soit tout simplement qu’il ne nous intéressait pas et que nous ne souhaitions pas nous pencher dessus. Auquel cas vous comprendrez bien que nous nous retrouvons ici face à un exercice critique particulier : écouter et donner une appréciation sur un disque qui de prime abord ne nous parle pas et dont nous ne connaissons rien des prédécesseurs, mais qui a tout de même suscité de l’intérêt chez vous et donc a fortiori non dénué de qualités. Bref…


En l’occurrence, votre serviteur était tout désigné pour se pencher sur le petit dernier de Puscifer car il a au moins l’avantage de (très bien) connaître les autres œuvres et projets auxquels a participé Mr Maynard James Keenan dont, vous le savez déjà, ce groupe-ci n’est qu’un alter-ego solo. Pour être exact, un passe-temps destiné à tromper son ennui en attendant que Tool et A Perfect Circle eussent enfin daigné sortir de leur silence, ce qui a pris la bagatelle de treize ans pour le premier et quatorze pour le second - le chemin de croix, si l’on peut dire, ayant pris fin en 2019. Dès lors, on peut comprendre qu’un artiste aussi singulier que Keenan ait éprouvé le besoin de s’exprimer durant cette très longue disette créative, ce qu’il a d’ailleurs fait avec une certaine manière : Puscifer a très vite su dépasser son statut de curiosité solo pour se hisser au rang de projet “sérieux” avec tous les guillemets que l’on pourrait insérer quand on connaît le côté facétieux, provocateur et un brin dérangé de MJK, dont l’extravagance capillaire et vestimentaire se reflète tout autant dans ses textes et, ici, dans sa musique. Reconnaissons qu’en termes de mauvais goût, on fait difficilement mieux qu’en mélangeant l’archange des ténèbres et la vulve féminine pour créer son nom de scène. Toujours est-il que Puscifer s’est fendu, depuis 2007, de quatre albums - celui-ci y compris - et trois EP, une production tout à fait honorable et significative.


Allez, on plonge dans Existential Reckoning. Premiers tours de platine, et d’emblée deux remarques : l’album est long, très long - une heure au compteur - et assez hermétique. Douze titres à tonalité indu-indé qui s’étirent souvent au-delà des cinq - six minutes, souvent articulés autour d’un unique motif mélodique, donc sans alternance couplets - refrains (ce n’est pas systématique cependant), souvent répétitifs et/ou redondants. À découvrir ainsi ce LP 4, on se dit que d’une part on n’a pas forcément eu tort de ne pas s’y intéresser de but en blanc, et de surcroît qu’on n’a sans doute rien manqué en ignorant ses prédécesseurs. Pour autant, vous l’avez élu “album oublié de l’automne”, et de surcroît un petit tour via les concurrents nous apprend que ce disque a tout de même été très bien accueilli par la critique et les fans de MJK. Alors soit, accordons-y un peu plus qu’un coup d’oreille à la sauvage.


Grand bien nous prend car à l’évidence il y a du bon à retenir dans Existential Reckoning, et même du très bon. Si l’on peut initialement s’interroger sur la surprenante retenue de Keenan au chant - sachant que le monsieur est quand même un technicien hors pair dans sa catégorie -, on constate que la voix se met au service de son œuvre et non l’inverse, celle-ci n’étant qu’une pierre sur laquelle se bâtit un édifice tout en boucles rythmiques et/ou instrumentales. A la manière des sampleurs, MJK tresse sa musique sur des motifs qu’il introduit, répète, supprime, décale, superpose pour aller rechercher différents rendus et ambiances. Une science qui s’exprime parfaitement sur un titre comme “Apocalyptical” troussé en allégorie de cette année 2020 aussi surréaliste que science-fictionnelle (on se rappellera que Keenan a chopé le Covid et qu'il a fait une forme sérieuse dont il garde a priori des séquelles pulmonaires), synthé tonal monolithique - voix en leitmotiv à la quinte qui créent une ambiance presque religieuse, guitares mécaniques - basse grondante - batterie marteau pilon qui tressent de belles nuances industrielles, chœurs féminins tout légers jouant sur plusieurs octaves alternés et des “tulut” évanescents, et toujours ces motifs qui arrivent, s’en vont et reviennent au gré de leurs envies : carton plein, c’est malin et ça fonctionne à plein tube. Plus travaillé, l’air de “The Underwhelming” paraît se baser sur les mêmes recettes mais instille un peu de délicatesse et crée un vrai refrain doux-amer, toujours avec cette désarmante retenue, on irait presque jusqu’à dire cette timidité dans la voix. Entre pop et trip-hop, rythmique hypnotique et électronique aussi généreuse que délicate, le morceau cartonne. Le tout est de réussir à entrer dans le délire et de se laisser flotter dans les circonvolutions cérébrales de Keenan qui, si on imagine qu’il pourrait se livrer aux pires pitreries sonores, sait se brider sans renâcler sur son intégrité artistique. Dès lors, on adhère à l’électronique baveuse et vocodérisée de “Grey Area” et les accointances à la Air période Moon Safari de “Theorem”, pour le coup presque lumineux dans son robotisme.


Étrangement, il faut attendre le cœur du disque pour que Maynard James Keenan utilise sa voix pour servir de point d’ancrage à un titre : “UPGrade” rehausse le tempo grâce à sa batterie diaphane mais laisse les autres instruments rêver chacun dans leur coin, et seul le chanteur parvient à ramener tout ce petit monde sous sa coup dans cette sorte de road trip électro-progressif psyché, mi-lascif, mi énervé. Et il faut attendre “Bullet Train To Iowa” pour retrouver les nuances vocales crispées et habitées toutes en rage contenue qui ont fait la renommée de MJK, même si vous ne devez pas vous attendre à l’entendre hurler sur cette galette. Or c’est aussi là que la mécanique commence à se gripper car ce titre dénote un manque de corps justement masqué par la performance au micro, et ce n’est pas une coda en Tool du pauvre qui nous fera redresser l’oreille. C’est un peu le problème avec les albums tripants : ils doivent nous saisir à la gorge et ne plus nous lâcher jusqu’à leur terme, or un décroché s’opère ici, clairement. On vire dans le pur exercice de style qui, sans aller jusqu’à l’abscons, perd de sa pertinence musicale.


La fin du disque alterne le pas mal (“Personal Prometheus”, fin et lumineux quoiqu’un brin longuet), le très sympathique (“A Singularity”, lancinant et désenchanté comme il faut), le percutant (“Fake Affront”, bien balancé et avec ces petits “shut the fuck up” bitchy qui font sourire) et le robuste (“Bedlamite”, sorte de Pure Reason Revolution période électro mâtiné de Nine Inch Nails sous Valium), mais aussi le très moyen (“Postulous”, pour le coup désespérément sybillin). Sans parler d’une entame franchement ratée, un “Bread And Circus” auquel on peine vraiment à accrocher tellement il manque de corps, d’allant, d’idées comme de folie douce… Et on en revient au premier grief de Existential Reckoning : tout aussi réussi soit-il, il faut bien le reconnaître, l’album se révèle beaucoup trop long et aurait gagné à de sérieux coups de ciseaux tout autant qu’à un contrepoint créatif qui manque bien souvent aux projets solo avec un artiste qui se retrouve seul aux commandes, libre de faire ce qu’il souhaite mais sans critique extérieure et par là-même sans remise en question. Reste un disque fort agréable, original, futé et jouissant de quelques excellents morceaux mais que l’on peine à écouter comme un tout en raison de son inconstance. Dommage...

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