Slayer
Repentless
Produit par Nuclear Blast
1- Delusions of Saviour / 2- Repentless / 3- Take Control / 4- Vices / 5- Cast the First Stone / 6- When the Stillness Comes / 7- Chasing Death / 8- Implode / 9- Piano Wire / 10- Atrocity Vendor / 11- You Against You / 12- Pride in Prejudice
Le destin des trasheux de Slayer était incertain à l'annonce du décès du guitariste fondateur, Jeff Hanneman en 2013. Et c'est à l'aide des baguettes de Paul Bostaph – qu'on avait pu entendre sur Divine Intervention -, et de Gary Holt (Exodus), que Kerry King et Tom Araya se mirent au travail.
Et on est loin du mémorable Reign in Blood. Après un "Desilusions of Saviour" prometteur, introduction instrumentale au riff accrocheur et au rythme lourd, on enchaîne sur le titre éponyme et porteur de l'album, "Repentless", dédié à Hanneman.
« No looking back, no regrets, no apologies
What you get is what you see
(..)
I'll be beating this guitar 'til the day I die »
Le thème est plutôt fédérateur, Bostaph enchaîne les descentes de toms avec dextérité, mais l'ensemble semble un peu léger. On retrouvera étonnamment, face à ce mémorial fougueux, un autre genre de message semblant également adressé à Hanneman, sur "You Against You" :
« Is this your paradise? You think you thought this through?
'Cause when you rolled the dice, the house came down on you
Don't care what you do or say, your suicide begins today
Have fun in paradise, this hell is just for you »
De toute évidence on a le sens des adieux chez Slayer.
Le gros travers de cet album est avant tout son manque d'innovation. Tant du point de vue des textes – messages vengeurs adressés à une société manipulée, régie par l'argent, aux politiques véreux, beaucoup de « fuck » pour souligner la rage dans le propos – , que de la composition – structures très classiques et convenues, aucune nuance dans le chant. On reconnaîtra malgré tout la qualité de jeu de Bostaph, tout comme celle des solos de King, qui ne suffisent malheureusement pas à sauver cet opus.
Quelques rescapés à noter : "When The Stillness Comes", à l'atmosphère plus sombre et brumeuse et au rythme plus lent, permettant à Araya d'appuyer davantage son texte par des accents toniques et des variations, plutôt que de le marteler sur les couplets et de screamer sur les refrains, à l'instar du reste de l'album. Les fans endeuillés apprécieront également "Piano Wire", titre inachevé de Jeff Hanneman, enregistré à l'époque de "World Painted Blood" mais ré-enregistré pour l'occasion et retravaillé – le jeu de Hanneman n'est donc pas sur la version finale, mais il s'agit bien de sa composition –, qui détonne par un son plus proche des origines du groupe et pourrait évoquer "Postmortem". Ce titre est peut-être le seul marqueur d'un changement de direction notable du groupe, tant le chant y détonne – d'aucuns pourraient y retrouver des nuances d'un James Hetfield des beaux jours –; la simplicité des enchaînements de triolets en fait un bon morceau de trash classique et apporte la preuve que la virtuosité dans un bordel musical – aussi bien organisé soit-il – ne suffit pas toujours à ancrer un morceau chez l'auditeur.
C'est peut-être là que le bât blesse: Slayer semble ici se cantonner à la démonstration, un état de ce dont ses musiciens sont capables, en dépit de la mort de l'un des membres ayant contribué à les porter jusqu'ici. Mais cet album ne parvient pas à éviter l'écueil de la redondance, quand il aurait probablement mieux valu prendre une direction radicalement différente, et profiter de la présence de musicos de talent pour explorer une autre scène, plus mélodique, ou offrir aux auditeurs un véritable album mémorial, retour au source d'un trash-métal lourd et direct, sans fioritures. C'est englué dans une absence de vision et un son finalement déjà entendu que le groupe nous délivre un album ne pouvant que laisser l'auditeur sur sa faim.