Alice Cooper
Special Forces
Produit par Richard Podolor
1- Who Do You Think We Are / 2- Seven & Seven Is / 3- Prettiest Cop on the Block / 4- Don't Talk Old to Me / 5- Generation Landslide '81 (live) / 6- Skeletons in the Closet / 7- You Want It, You Got It / 8- You Look Good In Rags / 9- You're a Movie / 10- Vicious Rumours
Special Forces est le premier volet de la trilogie oubliée, d’aucuns diront oubliables, d’Alice Cooper. On ne dit pas reniée, à moins que Furnier ne nous raconte une fable pour se déresponsabiliser, mais bien oubliée : Alice Cooper ne se souvient plus d'avoir écrit et enregistré les trois albums du début des années 1980, dans une période où il sombre dans les addictions, drogues dures d’abord puis retour aux effluves éthyliques, son plus grand démon. A tel point que la tournée qui suit l’album, qui passe notamment dans les recoins de notre bel Hexagone (une émission est tournée à Paris), fut la dernière avant longtemps, tant l’homme ne pouvait plus assurer un tel rythme.
De toute façon, nous sommes bien au cœur des années 1980 et Alice Cooper avait prouvé qu’il comptait prendre le train en marche et s’adapter à l’esthétique de l’époque. Il l’avait fait avec intelligence sur Flush the Fashion, et articule encore de bonnes idées sur Special Forces. Ainsi, "Who Do You Think We Are", avec son introduction synthétique et spatiale, propose ensuite de revisiter un rock classique avec subtilité (notamment par des petits ponts réguliers qui quittent le côté rock’n’roll, ou par un chorus assez efficace). La reprise de Love, "Seven & Seven Is", rejoint les couleurs du précédent opus dans son style brut mâtiné d’électronique, tandis que le live de "Generation Lanslide 81" (original sur Billion Dollar Babies) tient bien la route dans cette version à la batterie relevée et plus électrique. Dans un style un peu plus hard 1980’s, "You Look Good in Rags" ou "Vicious Rumors" (presque punk) ne sont pas non plus dénués de charmes, sans être non plus mémorables.
Mais l’album comporte également un certain nombre de morceaux assez anecdotiques, aux structures branlantes ("Don’t Talk Old to Me" : ses passages saturés sont trop heurtés, ses moments plus calmes sont ennuyeux) sur lesquels nous ne nous attarderons pas, sinon pour mettre en avant quelques moments gênants (pas dans les sens embêtant, plutôt dans le sens où ils mettent mal à l’aise pour l’artiste). "Skeletons in the Closet" est une sorte de "Salsa du Démon" chantée en anglais, avec une basse un peu funk, une boîte à rythme et des claviers pourris dans le pire de ce que les années 1980 ont pu proposer. On passera sur le titre ridicule. "You Want It, You Got It" est d’un minimalisme crasse, là encore avec les sons de synthés les plus minables de la création ; "You’re a Movie", alors que le riff, sans être sensationnel, pourrait marcher, devient risible entre sa répétitivité et Cooper qui donne plus l’impression de divaguer que de chanter, comme un fou ivre qui se parlerait à lui-même.
Entre ses deux faces très déséquilibrées, ses passages assez indigents, et ses moments sympathiques rarement exceptionnels, Special Forces tombera sûrement dans les oubliettes pour la plupart des auditeurs. Comme la majeure partie des albums suivants d’ailleurs.
A écouter : "Who Do You Think We Are", "Seven & Seven Is"