King Gizzard And The Lizard Wizard
Omnium Gatherum
Produit par
1- The Dripping Tap / 2- Magenta Mountain / 3- Kepler?22b / 4- Gaia / 5- Ambergris / 6- Sadie Sorceress / 7- Evilest Man / 8- The Garden Goblin / 9- Blame It On The Weather / 10- Persistence / 11- The Grim Reaper / 12- Presumptuous / 13- Predator X / 14- Red Smoke / 15- Candles / 16- The Funeral
Stakhanovistes, hyperactifs, prolifiques, généreux, ... Nombreux sont les superlatifs employés lorsqu’il s’agit d’évoquer les King Gizzard & the Lizard Wizard et leur impressionnante discographie : 20 albums en une dizaine d’années, en attendant les 3 petits derniers prévus pour... octobre (oui c’est tout bientôt) !
Faire un point d’étape sur la carrière de nos 6 sorciers australo-psychédéliques n’est clairement pas le but ici et serait, de plus, bien trop chronophage. Intéressons-nous plutôt au dernier cru estampillé KGLW, un bon gros double album des familles sorti en avril dernier, que nous tamponnerons d’un seul adjectif : éclectique.
En effet, Ominum Gatherum, bien que pouvant rebuter en se confrontant à sa tracklist massive (16 titres) et en se frottant d'emblée à son imposant premier titre (de 18 minutes), surprend par la passion musicale qui s’y dégage, animée par un groupe délesté du concept de ligne directrice, habituellement indissociable de chacune de leurs productions. Que vous ayez été séduits par le groove de Fishing for Fishies, par l’hommage heavy de Infest the Rats' Nest ou par la légèreté psychédélique de Butterfly 3000, vous trouverez indéniablement ici quelque chose à vous mettre sous la dent. Préparez-vous donc à accueillir ce 20e album studio comme un gigantesque panorama stylistique, balayant les influences King Gizzard de ces 10 dernières années, rien que ça.
En quelque sorte, le voilà ce fameux point d’étape : 1h20 de musique où viennent s’enchevêtrer prog-rock (“The Dripping Tap”), free-jazz (“Magenta Montain”, “The Funeral”), trash metal (“Gaia”, “Predator X”), space-pop (“Kepler-22b”) et ballades psychés (“Ambergis”, “Persistance”). Les marques identitaires sont nombreuses, se chassant et croisant parfois même au sein d’un même titre. Cas le plus flagrant avec “Evilest Man”, doté du groove d’un Fishing for Fishies (2019), d’un fragment de pop aérienne du Butterfly 3000 (2021) et du psychédélisme ambiant de Polygondwanaland (2017). “Gaia” vendra quant à lui mette bout à bout un fuzz extrait bien nommé I’m in Your Mind Fuzz (2014) et un trash emprunté à Infest The Rats’ Nest (2019) de par ses power chords lourds et la voix profonde de Stu Mackenzie, décidément à l’aise dans tous les registres. La transition avec le contrasté “Ambergris” n'est de plus sans rappeler le génie de la boucle infinie du Nonagon Infinity de 2016.
En plus de l’épique introduction - peut-on encore appeler introduction un titre affichant plus de 15 minutes au compteur ? Autre débat, nous poserons la question à Metric – se démarquent de cet impressionnant panachage le planant “Magenta Montain” à la boucle synthétique envoutante, ainsi que le groove irrésistible et la flute traversière de “Presumptuous”.
Comme pour nous prouver qu’ils sont encore capables de se réinventer, quelques sons inédits viendront même se greffer à l’ensemble. Cette énième preuve d’une diversité sans failles misera cette fois sur des sonorités modernes, jouant la carte du hip-hop à la sauce 90s (“Sadie Sorceress”, “The Grim Reaper”). Vous y remarquerez même le malin clin d’œil adressé à la gamme microtonale (la paire KG / LW de 2020/2021), décidément !
Cet album n’est définitivement pas un coup de génie et présente même parfois quelques redondances, surtout en atteignant la fin de parcours (peut être que notre attention s’ébrèche-t-elle aussi ?). Son intérêt repose principalement sur cette ambitieuse revisite du (vaste) carcan musical de nos 6 lascars, habités par cette volonté de faire cohabiter concepts et registres musicaux habituellement préconçus comme incompatibles au sein d’un même disque. Et finalement, pour un groupe habituellement si ordonné ne serait-ce pas une qualité ?
Bernés par ce rythme infernal, il est vrai que les sorties du sextet australien ne sont plus forcément attendues de pied ferme. C’est en définitive cette variété artistique indéniable accolée à l'identité du groupe qui permet d’entretenir la flamme et ce sentiment de “reviens-y”, toujours avides de se prêter au jeu de ces revirements stylistiques. Il ne reste plus qu’à se donner rendez-vous vendredi, pour voir s’ouvrir un nouveau chapitre de la machine australienne !
A écouter : “The Dripping Tap”, “Magenta Montain”, “Presumptuous”