Orden Ogan
Final Days
Produit par
1- In the Dawn of the AI
S’il y a bien un sous-genre du rock (en l’occurrence, plus précisément, du Metal) qu’on peut parfois accuser de tourner en rond, c’est le Power Metal - parole d’un convaincu par cette scène ô combien admirable. Il semble néanmoins, que les grands pontes germaniques du genre – les bourrins en kilt de Grave Digger, les pirates mélodiques de Running Wild, la galaxie fondatrice Helloween/Gamma Ray et les chasseurs de dragons de Blind Guardian – avaient presque tout dit. On verra ce qu’il en est cette années puisque ces formations ont presque toutes prévu de faire paraître un opus en 2021 – sauf Gamma Ray, et Grave Digger (pour qui se fut fait l’an dernier). Cette assertion est bien sûr caricaturale : parmi les pionniers il y a bien d’autres beaux représentants moins connus, et la relève propose des choses intéressantes. D’ailleurs, Orden Ogan fait indubitablement partie des groupes qui apportent avec talent un beau renouvellement sans se couper des racines.
Les Allemands se démarquent par un style marqué et grandiloquent, mais également par un univers visuel travaillé, notamment à travers une mascotte qui circule depuis les mondes fantastiques (To The End, 2012) jusqu’aux westerns steampunk (Gunmen, 2017), en passant, désormais, par l’espace et le numérique d’après ce qu’affiche la pochette de Final Days – et le champ lexical des titres. Après avoir été repoussé deux fois à cause de la pandémie mondiale, ce septième album arrive enfin dans les bacs pour nous emporter dans son monde virtuel et avant tout électrique.
Riche en sons électroniques, en voix trafiquées, en ambiance spatiales et informatiques, Final Days est irrigué par son concept. Un titre comme "In the Dawn of the AI" procède ainsi de l’écriture épique du groupe en lui apportant des couleurs propres à la thématique, ce qui en fait une piste réussie. Ces ajouts sonores aux services de leur thématique ne sont jamais invasifs, ni ne brouillent l’écoute.
Néanmoins, pour jouer sur les sens du terme, une certaine modernité un peu tape à l’œil est audible afin peut-être de diversifier leur public ou de faire évoluer leur musique (FM ou mainstream ne seraient pas les termes exacts, easylistening dirons-nous). Le refrain de "Heart of the Android", le petit côté Lady Gaga de l’introduction de "Inferno", ou encore le symphonisme outrancier de "Interstellar" aux vrais airs de Running Wild lifté (mais quel solo à la Petrucci !) ajoutent une touche accessible à un ensemble très Power Metal par ailleurs. Ces aspects peuvent parfois être déplaisants comme le chant féminin emphatique d’"Alone in the Dark", qui enrobe le titre d’une tonalité Metal Symphonique (tellement stéréotypée) et finalement mièvre. En plus d’être ennuyant, c’est assez surfait. De même, on notera une tentative Nu-Metal d’assez mauvais goût sur "Absolution for Our Final Days". A vouloir se renouveler, ambition louable, on risque toujours de se fourvoyer. Les premiers exemples suscités réussissent le pari là où les suivants pèchent par des choix contestables.
Evoquons néanmoins de vrais bons points. Les parties de guitare sont de vraies réussites, avec des soli d’une virtuosité implacable, dans une esthétique presque metal-progressif tant la technique est exacerbée. Un autre tournant est à noter sur une partie des morceaux, la volonté de durcir les riffs (entendez bourrins), ainsi vont "Heart of the Android" ou "Black Hole". "Hollow" accorde ainsi des lignes survoltées et brutales avec une belle approche Power Metal (dans l'esprit d'un Blind Guardian), et atteint son but. Finalement, ce sont des titres inscrits dans leur registre initial qui se détachent le plus : l’efficace et non moins épique "Let the Fire Rain" et l’hymne "It Is Over". Un final explosif.
Orden Ogan signe donc un septième album honorable mais en demi-teinte. S’il assume jusqu’au bout son concept et confirme son talent avec titres enthousiasmants, certains travers esthétiques sont à noter en particulier dans la partie centrale de l’opus. La volonté de proposer quelque chose d’un peu nouveau, ou du moins de tenter des hybridations avec d’autres genres, est louable, mais les choix n’ont pas toujours été des plus heureux. Finissons tout de même sur une note positive en rappelant que Final Days demeure une production solide et agréable.