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Critique d'album

The Dear Hunter


Act IV: Rebirth in Reprise


(04/09/2015 - Equal Vision Records - Rock progressif US - Genre : Rock)
Produit par Casey Crescenzo

1- Rebirth / 2- The Old Haunt / 3- Waves / 4- At the End of the Earth / 5- Remembered / 6- A Night on the Town / 7- Is There Anybody Here? / 8- The Squeaky Wheel / 9- The Bitter Suite IV and V: The Congregation and the Sermon in the Silt / 10- The Bitter Suite VI: Abandon / 11- King of Swords (Reversed) / 12- If All Goes Well / 13- The Line / 14- Wait / 15- Ouroboros
Note de 5/5
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Note de 4.5/5 pour cet album
"Point culminant dans l’épopée fantastique de The Dear Hunter"
Franck, le 07/05/2021
( mots)

Les années défilent, les codes et les mœurs changent, mais une chose persiste : notre attrait pour les épopées et grands récits d’aventure. Qu'elles soient issues de la littérature, du cinéma ou du secteur vidéoludique, certaines de ces histoires alimentent aujourd’hui une véritable mythologie au sein de la culture populaire. Le septième art l’a bien compris et mise plus que jamais sur cette inépuisable ressource. Que ce soit à travers des terres imprégnées de fantasy, des univers partagés réunissant des super-héros, ou encore dans l’immensité de l’espace, ces indétrônables franchises n’arrêtent plus d’enfanter préquelles, suites et réinterprétations. Même si la démarche peut sembler commerciale et opportuniste, nous nous laissons prendre au jeu. Car ce qui nous attire avant tout, au-delà du divertissement, c’est de pouvoir assister au développement d’un univers aux possibilités infinies nous faisant momentanément oublier les affres du quotidien.


Force est de constater que ce phénomène se retrouve aussi dans la musique, celle-ci pouvant devenir un formidable stimulant pour l’imagination. Récemment, plusieurs groupes ont pu s’illustrer avec des concepts forts et ambitieux renforçant toujours plus ce lien délicat entre musique et imagerie : on pensera notamment à JPL qui est en train de tutoyer les sommets du rock progressif français avec sa trilogie de l’humanité ; mais aussi aux Allemands de The Ocean Collective qui ont pu finir leur monumentale série autour des différentes ères géologiques. On pourrait citer bien d’autres formations, mais difficile de ne pas faire l’éloge du groupe The Dear Hunter qui se pose comme un véritable spécialiste en la matière. Depuis 2006, le groupe américain façonne un édifice magistral - composé de plusieurs concept-albums - relatant la vie d’un personnage fictif au début du XXe siècle (surnommé le "Dear Hunter"). Ce véritable opéra-rock est avant tout la création du chanteur-compositeur (et multi-instrumentaliste) Casey Crescenzo, qui, dès le départ imagina son œuvre sous forme d’une trame scénaristique scindée en six actes (le sixième et dernier acte n’étant pas encore réalisé). D’abord un projet personnel de son auteur, avant de devenir un groupe à part entière, The Dear Hunter a eu l’occasion d’explorer des genres et des registres variés (rock, folk, musique classique, jazz,…) pour aboutir à une fusion singulière de rock progressif et d’indie rock.


Au même titre qu’une certaine saga ayant lieu dans une galaxie lointaine, vous pouvez tout à fait débuter l’expérience par les épisodes IV et V. Ceux-ci marquent en effet un gap musical et stylistique dans l’aventure de notre cher chasseur. Cela ne vous empêchera bien évidement pas de revenir à la première trilogie tout aussi passionnante (un peu plus expérimentale soit dit en passant) le moment venu. Vous n’aurez pas non plus besoin de vous lancer dans une étude approfondie pour profiter de l’expérience, le scénario et les textes étant avant tout un fil conducteur pour dépeindre différentes ambiances en fonction de l’évolution de son protagoniste (ce dernier faisant face aux évènements mondiaux de ce début de siècle). Cet album se pose clairement comme le point culminant de cette aventure et comme l’œuvre la plus aboutie de son auteur. Tout d’abord parce qu’il reprend le meilleur des précédents épisodes mais surtout car il a pu bénéficier de l’apport des différentes expériences initiées en parallèle. Pendant les six ans séparant les actes III et IV, Crescenzo et sa bande ont en effet pu élargir leur portefeuille de sonorités : un nouveau concept-album d’envergure - composé de pas moins de 11 EP - visant à retranscrire chaque couleur en musique (The Color Spectrum, 2011), ou encore un album autonome (The Migrant, 2013) leur permettant d’explorer des styles plus personnels. Durant cette période de transition, Crescenzo commence également à faire part de son souhait d’écrire une symphonie. Ce projet aboutira finalement en 2020 avec l’album The Fox and the Hunt (en collaboration avec le chef d’orchestre Brian Adam McCune), reprenant plusieurs thématiques et lignes mélodiques initiées dans les actes.


Ce penchant pour la musique classique se devinait déjà sur les premières productions du groupe, mais se renforce sur ce quatrième acte. L’association de la section orchestrale (enregistrée avec l’Awesöme Orchestra dirigé par David Möschler) avec une musique qui a toujours fait part d’une certaine théâtralité s’avère des plus convaincante. Cet univers pittoresque et grandiloquent exploite ainsi tout son potentiel émotionnel, grâce à une profondeur d’écoute saisissante et une touche de lyrisme supplémentaire. Dès lors, les passages orchestraux assurent une réelle continuité tout au long de l’album, ceci grâce à des transitions finement amenées et une excellente régulation du rythme. 


Faisant office d’épilogue, le titre "Rebirth" pose le décor à l’aide de différents chœurs voluptueux, laissant le chant prendre une posture de narrateur. L’orchestre prend le relai dans une ambiance joviale avant de durcir le ton et d’accélérer le rythme pour mieux enchainer avec le nettement plus rock "The Old Haunt". L’auditeur se voit alors embarqué par l’énergie grâcieuse du refrain avant d’être captivé par des envolées instrumentales à la forte résonnance cinématographique.


A l’image de la magnifique pochette, l’ambiance de ce quatrième chapitre se veut chaleureuse, dépeignant un paysage aux couleurs chaudes et chatoyantes. En parsemant son récit d’instants plus enjoués, le groupe n’hésite pas à surprendre. On pensera notamment à la rythmique tango émergeant au milieu de l’atmosphère mélancolique de "Is There Anybody Here", aux élans disco de l’imparable "King of Swords" ou encore au début en fanfare de "A Night on the Town". 


Chacun des morceaux présente une structure plus complexe qu’il n’y parait, Casey Crescenzo prenant soin de maintenir une certaine imprévisibilité et n’hésite pas à sortir du traditionnel couplet-refrain. En résulte une musique qui peut à tout moment changer de registre pour bifurquer vers des structures beaucoup plus progressives. Mais c’est surtout avec ses pépites pop que le groupe américain s’illustre sur cet album : dans un style entre Death Cab for Cutie et Coldplay, un titre comme "Waves" saura marquer durablement l’auditeur grâce à ses chœurs enivrants et ses mélodies singulières. Que ce soient avec des titres très rythmés aux accents brit-pop ("The Squeaky Wheel"), ou encore des passages particulièrement dansants ("King of Swords"), le groupe fait part d’une étonnante maitrise de son sujet et parvient même à créer une véritable cohérence d’ensemble malgré l’hétérogénéité des styles abordés.


Les amateurs du groupe seront ravis de retrouver quelques rappels aux précédents opus, comme la réutilisation de la thématique de "The Lake and the River" (Act II, 2007), ou encore la suite de la longue composition "The Bitter Suite" initiées six ans plus tôt (Act III, 2009). Casey Crescenzo veille méthodiquement à la cohérence de son univers et sait exactement quelle suite donner aux aventures de son personnage. Ainsi, le ton beaucoup plus grave du titre "Wait" fait office d’une subtile passerelle vers l’atmosphère crépusculaire de l’acte V (Hymns with the Devil in Confessional, 2016). Et pour cause, les deux actes ont été enregistré dans le même laps de temps, d’où cette connexion très marquée dans la direction artistique. Il y a fort à parier que l’acte VI et dernier épisode de cette fascinante épopée musicale, prenne un chemin tout autre, avec pourquoi pas des compositions entièrement symphoniques... 


Avec son hexalogie, le groupe mené par Casey Crescenzo nous offre une œuvre passionnante qui atteint un parfait équilibre avec ce quatrième acte. A la fois sommet d’une discographie déjà bien fournie et prouesse artistique qui ne sombre jamais dans la démesure, Rebirth in Reprise se pose comme un album indispensable pour tout amateur de musiques progressives et d’indie rock sophistiqué. En attendant un acte final qui ne saurait tarder, nous vous invitons à découvrir ce groupe - somme toute peu connu – et vous plonger dans une réelle aventure musicale. Comme quoi, le rock aussi a droit à ses grandes épopées.

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