Pink Floyd, from discovery to immersion
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Introduction
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- Remasterisation et coffret intégrale, troisième match (ou plus si affinité)
- Why Pink Floyd? Part one : looking for a masterpiece
- Why Pink Floyd? Part two : exploring the dark side
- Why Pink Floyd? Part three : the spirit never dies
- Interview : Roger Waters, le mur et le miroir
- Psychédéliques sixities : psychédélires et psychédélices (première partie)
- Psychédéliques sixities : psychédélires et psychédélices (deuxième partie)
- Psychédéliques sixties : psychédélires et psychédélices (troisième partie)
- Les héritiers de Pink Anderson et Floyd Council
- Dix bonnes raisons d'écouter Pink Floyd en 2011
- By the way, which one's Pink?
- Echoes from the past
- More Pink Floyd
Psychédéliques sixities : psychédélires et psychédélices (deuxième partie)
Made in Britain
Qu'en est-il, tout d'abord, de la différenciation avec la musique psychédélique américaine? À la différence de l'"Acid Rock" tel qu'on le dénommait souvent aux States, et tout en partageant les mêmes objectifs, les Anglais semblaient, à cette période, moins axés sur les longues improvisations générées par le côté rituel que pouvaient représenter les concerts. Même si ceux-ci étaient fondamentaux, en particulier à Londres dans ses salles devenues mythiques car disparues comme le UFO ou la Roundhouse, le psychédélisme britannique était plus ancré dans la tradition de la "pop song", de la facétie surréaliste et ludique ou, musicalement, d'une expérimentation qui l'éloignait des racines purement rhythm and blues.
Un artiste va, à lui tout seul, représenter ces discordances et nuances, Jimi Hendrix. Natif de Seattle, il sera découvert puis rapatrié en Angleterre par Chas Chandler des Animals. Deux albums, Are You Experienced (sans point d'interrogation comme si la chose allait de soi) puis Axis: Bold As Love, révolutionneront l'idée que l'on pouvait se faire de l'usage de la guitare. Aucun effet sonore ne lui était interdit, aucune percée créative ne lui était fermée, mais le tout restait imprégné de ses racines blues. Electric Ladyland qui suivra pointera le nez vers ce qu'aurait pu être sa carrière interrompue par la mort. Il préfigurera néanmoins la direction que prendra la musique populaire dans les années suivantes. Clapton était surnommé "God" par ses admirateurs, aucun qualificatif n'a encore été trouvé pour rendre justice à Hendrix.
Ce qui caractérisait donc l'Angleterre était une "contestation" presque bon enfant, l'esprit "fun" tel qu'il était véhiculé par les radios pirates alors que les États-Unis, eux, étaient traversés par la dissension que représentaient la Guerre du Vietnam et le Mouvement des Droits Civiques. Immanquablement l'humeur, outre Manche, ne pouvait être qu'autre, symbolisée qu'elle était par le journal de la contre culture au titre révélateur (Oz) comme l'était son "livre manifeste": Playpower de Richard Neville.
Assez paradoxalement c'est le mouvement des Mods (pour "modernes"), tout épris de musique "soul" qu'il soit, qui s'est emparé, aux côtés des classes moyennes étudiantes, de cette nouvelle esthétique. Il y avait l'attrait pour l'expérimentation et aussi, dans la culture "mod", un usage quasi quotidien des drogues (en particulier les amphétamines) qui leur permettaient de vivre la nuit de façon pour le moins stimulante. Un témoignage de cette effervescence se retrouve d'ailleurs dans un titre des Pretty Things qui se débarrassaient peu à peu de leurs oripeaux "rots" et interprétaient, dès 1965, "Midnight To Six Man" avec sa fameuse phrase d'introduction, emblématique de la période: "I've never seen the people I know / In the bright light of day."
Les Beatles avaient, bien évidemment, creusé le sillon avec, dès 1964, un "single" agencé autour du feedback: "I Feel Fine". Un an plus tard, leur album Rubber Soul approfondissait certains procédés comme, par exemple, l'utilisation de la cithare sur "Norwegian Wood" ou le clavecin sur "In My Life". "Rain" en 66, se caractérisait par le technique du "backmasking" (plage jouée à l'envers) et Revolver avec "Tomoorow Never Knows" privilégiait les atmosphères orientalistes.
Mais précurseurs ils étaient, et ils le seront encore, nous le verrons, plus tard. La scène pop anglaise devenait de plus fervente de ces délires soniques. Les Who, groupe "mod", par excellence avaient sur leur premier 45 tours "Anyway Anyhow Anywhere" (titre on ne peut plus représentatif de ce que peut être une réalité transcendée) fait bon usage du feedback et de la distorsion. Leur suivant, l'hymne "My Generation", se terminait sur des effets "free form" et, peu à peu, le quatuor s'insérait de plus en plus dans l'espace psychédélique avec les quelques teintes (effets sonores entrecoupant les plages, jingles commerciaux) qui parsèment The Who Sell Out ("Armenia City In The Sky") et, thématiquement, avec deux "singles" abordant la problématique de l'identité: "I'm A Boy" et "Substitute". Plus tamisés d'un point de vue musical il démontrent, en contrepartie, que l'usage de certains procédés psychotechniques n'est pas nécessaire pour explorer des éléments ayant trait à la quête de son soi (ou son "moi"). Tommy, qui sortira quelques années plus tard, en sera à tous égards la résultante.
De son côté, la première mouture du Floyd avec Syd Barrett ne va-t-elle pas, elle aussi, développer la même interrogation sur son premier "single", la pop compulsive et inquiétante de "Arnold Layne" et le récit de ce personnage qui ne peut exister qu'au travers de la multitude de vêtements qu'il endosse ?
Parallèlement, un autre groupe issu du blues va faire sien ces nouvelles approches psychédéliques. Les Yardbirds de Clapton puis, surtout, du plus doué d'entre tous ces guitaristes, Jeff Beck, délivrera plusieurs titres plus que marquants. "Still I'm Sad", dans un premier temps, offrira aux auditeurs une incroyable mélopée sur fond de chants grégoriens et de musique world. Ensuite, Beck s'emparera du groupe, accélérera le tempo et multipliera les "rave ups" plus ou moins improvisés. Le résultat est confondant sur d'ingéniosité et de créativité: "Psycho Daisies" déboulonnera en moins de 2 minutes les clichés blues, "Shapes of Things" cultivera à merveille pop song accrocheuse et effets de "sustain" à la guitare et, cerises sur le gâteau, "Over Under Sideways Down" tout comme "Happening Ten Years Time Ago" regorgeront d'inventivité à la six cordes et aux orchestrations tout en remettant en cause nos perceptions de la réalité tangible, géométrique pour le premier titre, temporelle pour le second.
Même Clapton, puriste du blues ayant laissé sa place à Beck parce que, précisément, les Yardbirds s'éloignaient de cet idiome, n'échappait pas à ce qui devenait plus qu'un mode avec Cream, trio fondé avec Jack Bruce et Ginger Baker. "I Feel Free" offrira une pop psychédélique contagieuse et, sur Disraeli Gear un morceau comme "Tales of Brave Ulysses" bien qu'il puisse sonner anodin de prime abord, se terminera sur un solo à la pédale wah wah d'anthologie tout comme il abordera lyriquement, par le biais de la légende d'Ulysse, l'épopée que peut constituer une expérience intérieure emplie de visions.
Si Clapton trempait sa guitare dans l'acide, d'autres n'étaient pas en reste signe s'il en est de l'ampleur du phénomène. Les réussites étaient néanmoins contrastées. Les Troggs, un sympathique combo pop-rock quelque peu primal, vont aborder l'idéologie de la contre culture avec un mid-tempo sensuel "Night Of The Long Grass" et récidiveront avec un "May Be The Madman" truffé d'effets psychédéliques remettant en cause, avec un certaine naïveté, l'idée que nous avons de la raison (May be the madman was right. un peu comme le morceau des Beatles "The Fool On The Hill").
Plus notables étaient les deux premiers 45 tours de Traffic, formé par un Stevie Winwood qui avait quitté le Spencer Davies Group trop limité à son goût. "Paper Sun" est un exemple de pop song orchestrée de manière foisonnante à la cithare et "Hole In My Shoe", autre "hit" du combo mêle habilement pop psychédélique à comptine enfantine comme pour explorer les domaines inconnus de la rêverie surréaliste. C'est dans cette même veine pseudo-ludique mais véritablement étrange qu'on pourrait d'ailleurs cataloguer le "See Emily Play" du Floyd période Barrett.
D'autres groupes vont se diriger vers le psychédélisme; les Small Faces, archétype de la formation "mod" au même titre que les Who mais avant une tendance rhythm and blues plus que palpable, vont nous offrir un délicieux et entraînant "single" développant l'idée de "fun" qu'on peut avoir à "getting high" avec l'insouciant et guilleret "Itchycoo Park" et proposera un bien beau "concept album", Ogen's Nut Gone Flake avec pochette dépliante ronde (le bon temps où l'"art work" faisait encore partie du disque artéfact) un an après un Seargeant Pepper's dont il s'inspire par le côté "variety show".
La même démarche animera les Pretty Things avec un étonnant S.F. Sorrow marqué par une inventivité musicale foisonnante aux antipodes de la production habituelle du groupe et suivi, peu après, par un Parachute qui, comme le précédent, e rencontrera hélas aucun écho (mais permettra au groupe d'être signé sur Swan Song, le label créé par Led Zeppelin (sic!)).
Citons, également, un autre groupe issu du "British Beat", les icôniques Kinks dont le lancinant "See My Friends" ou un "Fancy" (en Fraçais: "imagination") introduit par une cithare démontrera l'application à se vouloir novateurs tout en restant dans le schéma de la "pop song".